Jour de l'An de mon enfance : un ti-bec aux mononcs, un ti-bec aux matantes
À chaque premier de l'An, la parenté débarquait chez nous pour nous souhaiter la bonne année. Il y avait les parents qui demeuraient près de chez nous et la grande visite d'Edgard et Marie-Rose.
Oncle Edgard et tante Marie-Rose venaient de Portneuf presque à chaque Jour de l'an, à moins qu'une grosse bordée de neige les empêche de prendre la route même avec leur grosse Chrysler que mon oncle Edgard vénérait. C'était son signe de richesse.
Mononc Edgard était le cultivateur prospère de son village. Un gros fumeur de pipe, du bon tabac de Joliette disait-il. Mais, comme il fumait comme la cheminée d'une grosse locomotive à vapeur, il empestait la maison. Tante Marie-Rose, fardée comme un actrice de Music-hall disait ma mère, sentait elle aussi le tabac, odeur qui se mélangeait avec son parfum Lancome dont elle était si fière. Vivre avec son Edgard c'était accepté, je suppose, de transporter partout l'odeur de son tabac à pipe.
Évidemment, quand ils entraient chez nous, on devait, c'était un rituel incontournable, leur donner des petits becs sur les joues en leur souhaitant santé et bonheur. J'haïssais donc ça, moi qui avait un odorat très développé. Mais on ne change pas les coutumes des grandes personnes quand on a dix ans et comme dit la chanson: C'est dans l'temps du jour de l'an, on s'donne la main, on s'embrasse.
Edgard s'assoyait dans la berceuse et commençaient alors les récits
de son enfance qui avaient toujours comme thème l'argent. Il radotait oncle Edgard.
- Quand j'étais enfant, mon père me donnait quatre trente sous à chaque semaine. Moi, j'mettais ça dans mon ti-cochon. Ben ça faisait cinquante-deux piasses par année. Ben quand j'ai eu vingt ans, j'avais sept cent vingt-huit piasses en banque. Avec ça, j'ai payé mon premier char. Tu vois, mon jeune, économiser ça s'apprend tôt dans la vie. Tu peux commencer aujourd'hui, le premier jour de l'année. Prends des bonnes résolutions... et bla-bla-bla.
Je faisais semblant d'être d'accord avec lui pour mettre fin à son sermon.
Après le diner, oncle Edgard et tante Marie-Rose repartaient pour Portneuf. Ne restait dans la maison que l'odeur de la pipe qui resterait incrustée pendant une semaine.
C'était comme ça que ça se passait chez nous le 1er janvier, et surement chez vous aussi et je suis presque certain que vous aviez un mononc qui fumait du bon tabac de Joliette.
C'était dans l'temps du jour de l'An, tap' la galett', les garçons les filles avec...
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